Baby boomers et générations X, Y et Z… La tentation est grande de classer les individus et d’adopter un management intergénérationnel. Toutefois, si l’âge d’un collaborateur influence certains aspects, ses attentes, ses besoins et son rapport au travail restent singuliers. Que recoupent ces générations et quel intérêt un manager peut-il en tirer ? Comment intégrer les spécificités générationnelles dans son management sans tomber dans le piège des stéréotypes ou des biais cognitifs ?

Les différentes générations en place dans l’entreprise

Par ordre chronologique, quatre générations sont amenées à collaborer au travail : les baby boomers et les générations X, Y et Z. Cette nomenclature a été initiée par Coupland (1991), lui-même inspiré de Hamblett et Deverson (1964).

Les Baby Boomers (1946-1964)

Les baby boomers sont nés après la Seconde Guerre mondiale. Ils regroupent deux décennies de naissances marquées par une forte croissante démographique, le « baby boom », d’où leur nom. Élevés en pleine expansion économique, les baby boomers incarneraient une vision de la société basée sur le capitalisme, le plein emploi et la famille traditionnelle. Au travail, ils sont réputés assidus, ambitieux et attachés à la stabilité et à la hiérarchie professionnelle. En outre, ils sont perçus comme fidèles à leur entreprise et ont souvent connu des carrières linéaires.

La génération X (1965-1980)

Cette génération a dû faire face à la transition économique et sociale. Chocs pétroliers, montée du chômage, explosion des divorces, la génération X profite malgré tout de l’émergence des nouvelles technologies et se forme rapidement au numérique et à Internet. Au travail, elle est perçue comme autonome et pragmatique. Elle afficherait par ailleurs une forme de scepticisme vis-à-vis de l’autorité, et apprécierait la flexibilité au travail.

La génération Y (1981-1991) – les Millennials

Son second surnom vient du fait que cette génération a atteint l’âge adulte au tournant des années 2000. La génération Y est la première à grandir avec Internet et les nouvelles technologies, avec lesquels elle est donc réputée à l’aise. On lui prête aussi une certaine ouverture d’esprit et sensibilité à la diversité et aux nouvelles façons de vivre et de travailler. Ainsi, la génération Y manifesterait un désir accru de donner du sens à son travail. Dans cette optique, elle viserait un emploi compatible avec sa vie privée, notamment à travers des horaires flexibles (flex office) ou le télétravail, et impliqué au sein d’une équipe.

La génération Z (1997-2010) – la « Gen Z »

Le raccourci n’est pas anodin puisque cette génération se caractérise par son hyper connectivité. Native du numérique, elle a grandi dans un monde multimédia aux échanges ultra rapides. Elle maîtrise les nouvelles technologies – notamment les réseaux sociaux – et recourt spontanément à l’intelligence artificielle. Elle est souvent décrite comme pragmatique, réaliste et sensible aux enjeux sociaux et environnementaux, notamment au sein de l’entreprise. Enfin, la « Gen Z » serait davantage séduite par l’entrepreneuriat et encline à évoluer en communauté, d’où leur appétence pour les afterworks.

Considérer l’individu avant sa génération d’appartenance ?

Une fois posées toutes ces considérations sur chaque génération, on peut se demander si elles ne masquent pas les particularités des individus. En psychologie comme en management opérationnel, deux dimensions caractérisent un individu : son universalité et sa singularité. Au sein d’une même génération coexistent des singularités qui brouillent les frontières entre générations. Pourquoi un sénior n’aspirerait-il pas lui aussi à donner du sens à son travail et à équilibrer vies professionnelle et personnelle ?

De nombreux spécialistes (Cf Publication du Pew Research Center) s’accordent désormais pour se méfier des stéréotypes de générations, y voyant une appréhension simpliste du monde et contraire à la complexité des relations humaines.

En se détachant des préjugés générationnels, le manager écarte les raccourcis de pensée pour se focaliser sur les particularités de chaque membre de l’équipe. Il peut ainsi mieux cerner les dynamiques propices à une coopération productive.

Les enjeux du management intergénérationnel

Tout en conservant en toile de fond les catégories générationnelles, les managers fuient une vision simplificatrice du monde et veillent à s’adapter à chaque collaborateur.

Éviter les écueils du jugement générationnel

Tout d’abord, le management des équipes est un management de proximité. Il s’apparente au coaching car il s’intéresse aux aspirations et méthodes de travail des salariés. Il évite ainsi l’écueil de les enfermer dans des jugements hâtifs et leur laisse aussi la possibilité d’évoluer et d’apprendre des autres au sein d’une même équipe.

Ensuite, un bon manager valorise les capacités et qualités de chacun pour créer une synergie au sein du groupe. De cette façon, il stimule l’apprentissage mutuel et la solidarité. De plus, il développe le sentiment d’appartenance à une équipe autour de valeurs partagées. Chaque collaborateur prend conscience de ses atouts et se sent valorisé lorsqu’il les partage. Dans cette relation de réciprocité, il accepte aussi plus facilement d’écouter et d’apprendre des autres, quel que soit son âge.

Enfin, le manager d’équipe crée du lien entre les générations et les individus en favorisant le respect de toutes les dimensions de la personnalité. Grâce à son intelligence émotionnelle, il exerce un leadership apprécié par son équipe.

Favoriser la mission d’équipe plutôt que la stratégie d’entreprise

Le manager fédère son équipe multigénérationnelle autour d’objectifs communs. Si la Génération Z est réputée plus volatile et décomplexée face à la possibilité de cumuler plusieurs emplois (voir le sondage Ipsos / Revolution@Work, qui révèle que 64% des jeunes français s’attendent à exercer plusieurs activités professionnelles en même temps), elle est aussi sensible à l’esprit de groupe. Ainsi, la fidélité à l’entreprise s’éclipse au profit d’une fidélité collaborative. Les jeunes générations intègrent une équipe avant d’intégrer une entreprise.

En s’appuyant sur ce constat, il devient plus aisé d’envisager de créer une dynamique et une cohésion d’équipe. Cette échelle s’avère plus opérationnelle que la stratégie d’entreprise, perçue comme plus lointaine et déconnectée des préoccupations du groupe. L’idée est bien de susciter le plaisir de travailler ensemble, que l’on soit un senior expérimenté, un trentenaire en quête de sens ou un Gen Z ultra connecté.

Finalement, la cohésion d’une équipe repose avant tout sur des valeurs et des objectifs communs. Les qualités managériales se fondent sur l’écoute attentive et la capacité à motiver et à fédérer. Un bon manager sait tirer parti des différences générationnelles et individuelles grâce à une approche flexible et personnalisée. En parallèle, il tient un discours inclusif qui favorise les relations sociales et la coopération, permettant ainsi à chaque collaborateur de s’épanouir sur le plan professionnel et personnel.